Quand il fait beau comme c’est le cas en ce moment, et que l’on nous dit « Ne sortez pas », qu’est-ce qui nous démange tous ? Sortir évidemment. L’Être humain, et en particulier le Français, a un sens aiguë de la contradiction. Nous sommes d’éternels grands enfants !
En fauteuil, il n’est pas difficile de rester dans l’appartement en ce qui me concerne : il suffit de faire appel à ma flemme en tirant un peu sur le poil de ma main, histoire qu’il me gène assez pour ne pas avoir envie de rouler vers d’autres horizons. Aurais-je été aussi sage si j’avais été sur mes deux jambes ?
Le comportement des autres
Parce que je me moque gentiment avec des « il n’y a aura jamais eu autant de personnes qui font du jogging qu’en confinement ! », comme la plupart d’entre nous. Mais honnêtement, si ça avait été mon seul moyen de voir autre chose que la vue de mon bureau ou de ma terrasse, si ça avait été une façon de m’occuper sans culpabiliser, ne l’aurais-je pas fait ? Si, bien sûr.
Cela dit à notre décharge, c’est tellement plus facile de critiquer un groupe de personnes que l’on ne connaît pas. Pendant ce temps-là, on ne se juge pas soi-même. On oublie qu’on ne met pas de masque quand on va faire les courses. Qu’on y va d’ailleurs toutes les semaines alors qu’une fois tous les dix ou quinze jours ça suffirait largement. On oublie qu’on se fait livrer des choses inutiles en faisant prendre des risques aux livreurs qui travaillent. Et le pire, c’est qu’à nous, on trouvera toujours de bonnes excuses.
Alors oui, c’est sûr, grâce à nous, le livreur en question aura sa paye à la fin du mois. Peut-être pas mirobolante, mais assez pour payer son loyer et ses « achats de première nécessité » comme ils les appellent. D’accord. Sauf que s’il en vient à chopper le virus et qu’il en meurt, sa paye elle ne lui servira pas à grand-chose.
Une réalité collective
Vous me trouvez violente ? J’exagère ? Au 6 mai, nous sommes à plus de 26 000 morts en France ; Pour vous donner une idée, c’est comme si toute la population de Montbéliard avait été décimée. Ou celle de Sens, de Rambouillet, de Saint-Dizier ou encore celle de Biarritz. Bref : je vous laisse choisir celle qui vous parle le plus.
Alors ou je sais bien, une ville parmi toutes celles qui existent dans notre pays, une ville qui, si ça se trouve, est située à des kilomètres de la vôtre. C’est comme ceux qui ne comprennent pas l’écologie à petite échelle parce qu’une petite action chez soi à côté des monstrueuses usines du monde entier, ça ne sert à rien.
Vous connaissez l’histoire du colibri ? Celui qui face à un feu gigantesque amène de l’eau goutte à goutte dans son bec. C’est sûr qu’à lui tout seul, il n’éteindrait rien du tout. Mais si comme lui, chacun faisait sa part même à son échelle, avec ses capacités et possibilités, que se passerait-il ? Aussi fou que cela puisse paraître, ça fonctionnerait. Parce que l’action d’une personne entraînera celles des autres, jusqu’à ce que ce soit finalement l’éléphant ou la baleine qui décide d’agir pour éteindre le brasier.
Chacun sa part
Face à un virus, c’est exactement la même chose. C’est sûr que ce n’est pas ma livraison de burger de la semaine dernière qui a fait les 278 morts d’hier. Mais ça ne m’a pas empêché de me sentir un peu honteuse d’avoir craqué. Si tout le monde fait ça, la fin de cette période de danger sanitaire ne cessera jamais.
J’ai conscience que ce que j’écris c’est bien joli, mais que chez nous (en France) la discipline c’est un problème. Je sais pertinemment, d’autant plus avec le déconfinement, que je ferai encore des choses qui n’iront pas dans le bon sens. Mais au moins faut-il être honnête avec soi-même, s’en rendre compte, pour faire mieux les autres jours.
Nous avons critiqué les autres, nous nous sommes jugés nous-même. Maintenant voyons plus loin encore. Dézoomons et regardons le bien que notre disparition a fait à la planète. Si nous avons été capables de lui rendre un souffle par obligation, c’est que nous sommes capables de le faire par choix. Et si nous bougions moins ? Et si nous limitions davantage nos trajets en voiture ? Nos voyages en avion ? Je ne parle pas de ceux dont le métier requiert ce genre de déplacements bien sûr, mais peut-être pourrions-nous… faire nos courses une fois tous les quinze jours plutôt que chaque semaine ? Acheter moins de vêtements, moins d’objets, mais le faire auprès de productions françaises, européennes au moins ? Plus de vélos, plus de cuisine maison, plus de transports en commun, moins d’emballages, moins de jetable, moins de courrier qui puisse être dématérialisé…
Un « demain » différent d’hier
Si le Coronavirus est source de bien des inquiétudes, il est également source de bien des réflexions. Sur nous, sur les autres et notre relation à eux, sur notre rythme de vie et son impact. Quelque part il nous oblige à ouvrir les yeux sur de nombreux points qui se situent très largement au-delà de notre nombril. Et si ça fait peur, espérons que c’en soit pour le meilleur !